
La récente sortie de l’honorable Moïse Nyarugabo, sénateur et proche de l’ancien président Joseph Kabila, appelant à une prétendue justice équitable entre le Chef de l’État Félix Tshisekedi et son prédécesseur, soulève une interrogation majeure : comment un juriste chevronné peut-il volontairement confondre légitimité constitutionnelle et initiatives individuelles hors mandat?
En effet, réagissant à la condamnation de Joseph Kabila par la Haute Cour militaire à la peine capitale, assortie d’une amende astronomique de 30 milliards de dollars pour collusion et soutien avéré au mouvement rebelle M23/AFC, le sénateur Nyarugabo a cru devoir s’indigner, en assimilant cette décision à une supposée injustice.
Dans une déclaration largement relayée par la presse, il s’interroge : si Joseph Kabila est condamné pour avoir été vu dans l’Est, pourquoi Félix Tshisekedi et son gouvernement, qui ont mandaté des délégations officielles à Doha pour discuter avec le même mouvement, ne subiraient-ils pas le même sort ?
Cette question, en apparence logique, révèle en réalité une profonde incompréhension des fondements de l’État, du monopole de la puissance publique, et du droit international relatif à la conduite de la paix et de la sécurité.
- La souveraineté n’est pas une fiction : elle est incarnée par le Chef de l’État.
L’article 69 de la Constitution de la République démocratique du Congo est clair :
« Le Président de la République est le symbole de l’unité nationale. Il veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État. Il est le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des accords et traités. »
Ce texte consacre Félix Tshisekedi, en tant que Président en exercice, comme détenteur légitime et exclusif du pouvoir d’engager l’État, tant sur le plan interne qu’externe.
Lorsqu’il envoie des émissaires à Doha, Nairobi ou Luanda, ce n’est pas pour négocier sa propre vision, mais pour traduire la volonté de la République dans un cadre diplomatique validé par les partenaires régionaux et internationaux.
À l’inverse, Joseph Kabila, devenu sénateur à vie, ne détient aucune prérogative exécutive ni diplomatique. Ses actes ne peuvent donc être interprétés que comme des initiatives personnelles, dépourvues de mandat légal, et, dans le cas présent, contraires à l’intérêt national.
- La différence entre diplomatie d’État et collusion avec l’ennemi.
Comparer les négociations officielles du gouvernement congolais à Doha avec les rencontres informelles ou occultes de l’ancien président avec des représentants du M23/AFC relève d’un amalgame dangereux.
Le M23/AFC n’est pas une organisation civile : il s’agit d’un mouvement armé reconnu comme force négative, soutenu par le Rwanda, et responsable d’innombrables crimes de guerre.
Ainsi, dialoguer officiellement dans le cadre d’un processus de paix encadré par la Communauté internationale ou sous la médiation du Qatar, n’a rien à voir avec des tractations parallèles, obscures, sans cadre légal, ni supervision internationale.
Le monopole de la violence légitime appartient à l’État, tout comme le monopole de la diplomatie.
Quiconque agit en marge de ces principes fondamentaux s’expose à la qualification juridique de trahison ou de collusion avec une force ennemie.
- L’analogie israélienne : un exemple révélateur.
Prenons un parallèle éclairant.
Imaginez qu’en Israël, le gouvernement de Benjamin Netanyahou décide d’ouvrir des pourparlers officiels avec le Hamas dans le cadre d’un accord de cessez-le-feu supervisé par l’ONU.
Dans ce cas, il s’agit d’un acte souverain, inscrit dans la politique de sécurité nationale.
Mais si, en parallèle, un ancien chef d’État ou un rabbin d’une petite synagogue de la banlieue de tel avive, décidait de mener ses propres discussions avec le même mouvement, en dehors du cadre institutionnel, cet acte serait immédiatement considéré comme une atteinte à la sécurité de l’État israélien et une usurpation de fonctions publiques.
C’est exactement le cas congolais :
• Tshisekedi agit en tant que Président légitime, garant de la paix et de l’unité nationale ;
• Kabila agit en tant qu’individu, sans mandat, et en relation avec une force hostile. L’un agit au nom de l’État ; l’autre en marge de l’État.
- La décision de la Haute Cour : un acte de souveraineté et de justice.
La condamnation de Joseph Kabila par la Haute Cour militaire à la peine de mort ne repose pas sur des « rumeurs » ou des « impressions », comme le prétend Moïse Nyarugabo, mais sur des preuves documentées :
• des contacts directs et soutenances logistiques au profit du M23/AFC;
• des réunions clandestines avec des représentants de ce mouvement reconnu comme bras armé du Rwanda ;
• des communications et facilitations financières attestant d’une complicité objective avec une puissance étrangère hostile.
Ces éléments constituent, en droit congolais, une haute trahison, une atteinte à la sûreté de l’État, et une complicité avec l’ennemi. Mais quel ennemi ? Un voleur, violeur, tueur en masse et egorgeur.
Par conséquent, la décision judiciaire s’inscrit dans la défense de la souveraineté nationale, non dans une logique de règlement politique.
- Justice à deux vitesses ? Non, justice à deux contextes.
La justice ne s’applique pas de manière identique à des situations juridiquement différentes.
Le Président Tshisekedi agit dans le cadre légal, avec mandat institutionnel, et sous le contrôle parlementaire et international.
L’ancien président Kabila, lui, agit sans mandat, dans une démarche personnelle et très opaque, aux conséquences déstabilisatrices pour la Nation.
Parler de « justice à deux vitesses», c’est ignorer que la légitimité du mandat détermine la licéité de l’acte.
Ce qui est légal pour l’État peut être illégal pour un particulier, fût-il ancien chef de l’État ou même superman.
- Conclusion : entre raison d’État et nostalgie d’un pouvoir déchu.
La sortie de Moïse Nyarugabo s’inscrit dans une logique de défense politique d’un mentor en disgrâce, mais elle piétine les principes fondamentaux du droit public.
Elle trahit une volonté de relativiser la trahison, en amalgamant légitimité institutionnelle et aventurisme personnel, égoïste ou traître ?
L’Histoire retiendra que dans un moment critique de la Nation, le Président Félix Tshisekedi a choisi la voie de la légalité, de la diplomatie et de la paix, pendant que son prédécesseur empruntait celle de l’ombre, des intrigues et de la connivence avec l’ennemi.
La justice militaire, en condamnant ce dernier, ne fait que protéger la République, son intégrité territoriale et son avenir souverain.
Ambassadeur- PCA Jean Thierry Monsenepwo
Patriote, communicateur politique et défenseur de la vision du Chef de l’État
Kinshasa, le 3 octobre 2025